Un cri d’enfant, le mien. Aurélien Philip Richard Duvauchelle, c’est avec ce nom là que j’ai poussé mon premier cri. Un nom assez difficile à porter, lorsqu’on sait à qui il a appartenu. Mon père est un homme d’affaire assez connu dans son milieu, la publicité je crois. Je n’ai jamais fait attention à tout ce qu’il me racontait, et je m’en fiche encore aujourd’hui. Mais lorsque j’étais petit, comme n’importe lequel des petits garçons, il était mon modèle. Comment ai-je pu rêver d’être lui ? Ma naïveté, encore. Quand Philip disait quelque chose, il fallait se taire et lui obéir. Ma mère l’a rapidement comprit, et a quitté le foyer quand elle en a eu l’occasion, c’est-à-dire après avoir mis au monde mon petit frère. Du coup, on s’est retrouvé tous les deux avec lui, qui n’en avait rien à faire. Nous étions des boulets dont il devait se débarrasser pour pouvoir aller bosser. Donc rapidement, nous avions été confiés à une nourrice. Notre père n’a jamais été là pour nous, sauf en apparence, et pour l’école. Nous devions être les meilleurs, et faire honneur au nom que nous portions. Mon frère et moi ne voulions pas le décevoir,  et c’est pour cela que nous avions étudié, et cela jusqu’à notre entrée au lycée. Là, nos chemins se sont séparés… Avec les meilleures notes de ma classe, et mon nom de famille, j’ai rapidement été inclus dans le groupe des fils à papa, qui organisent des fêtes spectaculaires juste pour montrer qu’ils ont de l’argent, et qui se fiche des autres jeunes. Mon frère faisait partis de ceux dont nous nous moquions, bien que je mette un point d’honneur à ne jamais le rabaisser. Mon père semblait fier de moi, et m’encouragea à continuer comme ça.

Morte. Et Philip, car oui je ne l’appelais jamais papa, nous le dit comme ça, à table. Elle est où Jeanne ? Elle est morte. Quel insensible ! Le pire dans tout ça, c’est que la femme qui nous a élevé me tient encore plus à cœur que mon cher père. Je ne sais pas si j’aurai aussi mal prit la nouvel si les rôles avaient été inversés. Nous avons pleuré ce soir-là, mon frère et moi. Nous n’avions plus la présence féminine et la femme à qui parler le soir. Il ne restait plus que nous deux, et Philip. Autrement dit, nous étions seuls maintenant. J’avoue avoir commencé à faire n’importe quoi à cette période, alors que mon frère se concentrait sur ses études, moi je les ai mises de côté. J’ai été à toutes les fêtes organisées de la capitale, et cela même lorsque mon bac fut proche. Et pourtant, je l’ai déchiré. J’étais sérieux en cours, et complètement barré quand la nuit tombait. Et Philip ne pouvait rien contre ça. Comment aurait-il pu l’être, il ne savait même pas si je me trouvais chez nous ou dehors. Un père exemplaire.

La dernière chose que j’ai fait pour mon géniteur, c’est suivre le plan qu’il avait toujours eu pour moi : Faire des études de médecine. Heureusement pour lui, ça ne me dérangeait pas de prendre cette voie, bien au contraire, elle semblait passionnante. Pour ce qui était des soirées, c’était maintenant tous les soirs, et dans tous Paris, avec la même bande de potes. Le code était simple entre nous. Entrer, se faire remarquer, faire tourner la tête de quelques filles (plus elles étaient nombreuses et mieux c’était), boire, et finir au lit pour les plus chanceux. Il y en avait un qui réussissait toutes les étapes à chaque fois, et il n’a jamais voulu nous dire son secret. Je m’en fichais un peu mais comme tous les soirs, je simulais. Non, ça ne me plaisait pas plus que ça de partir en « chasse » de filles, et d’avoir un beau palmarès. Je dansais avec, échangeais quelques baisers fiévreux sur la piste, mais ça n’allait jamais plus loin. Heureusement pour moi, personne ne s’est jamais posé de question, les filles faisant croire à leur copine qu’elles avaient réussi à « m’avoir ». Ça m’écœurait. Je n’étais personne, quelle gloire y avait-il ? Mais voilà, j’étais dans cette « bande » et maintenant, je devais assumer.

Deux années sont passées, et j’ai retapé ma première année de médecine. En même temps, quand on passe plus de temps dans les rues de Paris qu’à réviser et bien… on se plante, normal. Je m’en fichais un peu, mon père payait... Et puis, sans ça, je n’aurai jamais rencontré Florian. Il a été… On peut le dire : mon premier amour. Et ouais, moi aussi ça m’a surpris lorsque j’ai ressenti cette vague m’envahir lorsque je lui ai parlé pour la première fois. Nous avons sympathisé, j’ai délaissé mes amis pour lui accorder quelques-unes de mes soirées, et nous sommes sortis ensemble après un mois. Dans le plus grand des secrets par contre. Je n’étais pas prêt à avouer à mes amis cette relation, et encore moins cette attirance. Alors je le faisais inviter là où j’allais, afin de pouvoir passer du temps avec lui, bien que d’un autre côté, je continuais mes vieilles habitudes avec les filles, et mes paris avec mes potes. Cela nous a valu de nombreuses disputes, que je ne prenais jamais au sérieux jusqu’à ce qu’il me quitte. C’était donc ça, un chagrin d’amour ? Ça faisait mal. Mon frère a été le seul à voir quelque chose, et le seul à qui j’ai osé avouer cette attirance. Il me certifia qu’il s’en fichait, mais son attitude disait tout le contraire, et nous nous sommes éloignés peu à peu.

Philip a fait faillite, et on a découvert qu’il avait un compte offshore. Enfin, je dis « on » mais c’est plutôt les flics. Et ce trouillard a préféré fuir, nous laissant dans la merde moi et mon frère. On a dû vendre la maison pour pouvoir rembourser ses dettes, et nous avons finis par prendre un appartement tous les deux, beaucoup moins cher et plus petit. Nous avons chacun une chambre, et partageons les pièces communes. Franchement, ça ne me dérangeait pas plus que ça que mon père soit parti, le seul problème était : Qui allait financer mes études maintenant ? J’en ai parlé là-bas et la réponse a été claire : Je devais travailler. Heureusement, cette fin d’année avait été payée, alors je devais profiter de ce qui allait être ma dernière année de liberté, toutes mes économies devront être investies dans le financement de mes études. Mais un soir, un homme m’aborda en boite. Ce que je pris pour un plan drague fut rapidement transformé en rendez-vous professionnel. Cet homme me proposa d’entrer dans son agence, et contre toute attente, j’ai accepté. Il faut dire que j’avais un coup dans le nez, et que j’étais assez désespéré de ne plus pouvoir sortir l’année prochaine… Et pourquoi ne pas essayer ? Et après un mois d’essai, Antoine me demanda si je comptais rester parmi eux, tout en m’aguichant avec une belle « prime d’acceptation » comme il disait. J’avoue que de sortir avec des hommes, bien que la plupart soient plus âgés, pour de l’argent était loin de me déplaire. Bon, il est vrai qu’il faut parfois donner de sa personne sexuellement parlant mais… Au moins, je pouvais coucher sans avoir à faire mon coming out… Et la plupart de mes clients ne veulent pas que leur « penchant » soit affiché ou divulgué donc… C’était plus facile pour tout le monde.